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Changer d'échelle

 

Je reprends la plume (ou plutôt le clavier) à un moment charnière dans notre chemin vers l’essentiel. 

 

Un virage important nous attend et celui-ci risque de conditionner la suite de bien des choses.  

 

Démarrer une démarche personnelle vers l’essentiel c’est une chose et changer d’échelle en est une autre. Au cours de ma démarche j’ai pu lire tout un tas d’articles prônant telle ou telle alternative, expliquant telle ou telle expérience sur comment faire mieux au quotidien, changer sa façon de consommer et réfléchir individuellement à ce à quoi pourrait ressembler le monde de demain. Des initiatives fleurissent un peu partout et je me réjouis de voir chaque jour de nouvelles actions et de nouvelles personnes dans cette mouvance.  

 

 

Maintenant que va-t-il se passer ? Est-ce que l’engouement va s’essouffler ou est-ce qu’il va devenir durable et transposable à d’autres ? 

 

 

Du haut de mon expérience dans le zéro déchet et le minimalisme je perçois aujourd’hui les limites de mon engagement et je m’interroge donc sur sa capacité à perdurer dans le temps. 

 

Pour vous donner un exemple concret, lorsque nous avons démarré le zéro déchet nous avons remplacé un tas d’objets jetables par des objets lavables et réutilisables (les cotons démaquillants, les éponges, …) 

 

En parallèle, nous avons acheté de la lessive en vrac, un produit au top sur le plan écologique. Néanmoins aujourd’hui mes cotons démaquillants, les serviettes de bain, les torchons ne ressortent pas « nickels » du lave-linge et cela devient pesant.  

 

 

Avec le temps les envies évoluent et aujourd’hui j’ai envie d’avoir des torchons et des serviettes de bain bien propres qui sentent bon et dont je suis fière lorsque des gens viennent nous rendre visite. Là vous devez vous demander où est-ce que je veux en venir… Et bien, la lessive écologique sans parfum n’est, il faut bien l’avouer, pas la plus efficace. Alors que faire ? Abandonner cette lessive pour revenir à une solution de lavage traditionnelle ? Changer les torchons et les serviettes par des neufs ? Tester autre chose ? 

 

 

Je me retrouve à douter de certaines solutions mises en place. Récemment j’ai enfin terminé mes anciens mascaras, ça a pris 3 ans ! Je me faisais une joie d’acheter enfin un mascara éthique. Mascara rechargeable, tube en bambou, couleur sympa, bref au top sur le papier. Mais voilà, au moment de l’utiliser il est seulement « moyen », quelques paquets, niveau volume on ne peut pas dire que ce soit impressionnant, une brosse très classique, bref un mascara de grande surface offre une expérience bien meilleure. 

 

 

Là encore je doute, est-ce que ce produit sera à la hauteur ? Est-ce que je vais m’en contenter ? Est-ce qu’un jour, la veille d’un mariage par exemple, je ne vais pas craquer pour un produit banal écologiquement mais remplissant bien mieux les fonctions premières attendues ? 

 

 

Globalement il est parfois très dur de se contenter de l’à peu près. D’autant plus lorsque ça commence à toucher tous les domaines. La lessive lave à peu près bien, le mascara fournit à peu près bien du volume, les vêtements d’occasion répondent à peu près à mes envies, les courses en local nous permettent d’avoir à peu près tous les fruits et légumes, les trajets en train permettent d’aller à peu près n’importe où, … Bref il faut bien admettre qu’aller à l’essentiel ce n’est pas toujours gagner en confort et en qualité de vie.  

 

 

Bien sûr, les produits vendus à la ferme sont meilleurs qu’en grande surface mais ils ne vendent pas de pastèque, d’avocat ou de fruits de la passion. Et le plus difficile dans tout ça c’est qu’à l’ère des réseaux sociaux prônant une vie parfaite à qui tout réussi, personne ne fait d’article sur les limites des alternatives écologiques sur le plan de l’efficacité et de l’usage. 

 

 

Alors bien sûr, il n’est sans doute pas « normal » compte tenu du réchauffement climatique d’avoir envie d’un voyage lointain, d’une nouvelle robe tendance ou d’un bon bain moussant rempli de colorants sympas. Néanmoins cela reste humain et autour de nous les messages incitant à la consommation sont tellement plus nombreux que les messages incitant à réduire. 

 

 

Aujourd’hui j’ai toutes ces réflexions car un petit bébé grandit dans mon ventre. Comme tout parent nous avons envie que cet enfant grandisse avec tout ce dont il a besoin et les tentations sont immenses tellement le choix qui s’offre à nous est grand. Et comme quelques parents sur le chemin de l’essentiel, nous avons envie de transmettre de l’amour et des valeurs avant tout, nous avons envie de limiter le tourbillon de consommation. Préserver les ressources, pour que cet enfant grandisse dans un monde où les ours blancs vivent encore en dehors des zoos, dans un monde où l’air est pur, dans un monde où il y a plus de poissons dans l’océan que de déchets plastiques. Dans la pratique ce n’est pas si simple, lorsque j’ai appris que j’étais enceinte, google l’a très vite su. Avant, mes parents, mes amis et même mon mari ! Ça fait peur mais c’est une réalité, il suffit d’une recherche internet pour recevoir tout un tas de messages publicitaires sur des vêtements de grossesse, des poussettes, et j’en passe. Les tentations sont multiples. Par ailleurs, il y a certains domaines où le zéro déchet et le minimalisme ne constituent pas le critère de choix numéro 1 : la santé est sans aucun doute l’un de ces domaines. En étant enceinte les recommandations alimentaires, la fatigue, le manque de temps, les changements physiques dans mon corps sont générateurs d’achats pas toujours des plus écologiques.  

 

 

« Ah la salade en sachet c’est mieux que la salade du jardin ? » 

 

« Ah le jambon blanc sous-vide c’est mieux que le jambon acheté chez mon boucher ? » 

 

« Ah acheter un soutien-gorge vite fait un soir de déplacement dans un centre commercial géant c’est mieux que de rester encore deux jours à être serrée comme ça ? » (je préfère ne pas regarder l’étiquette made in [loin] dans des conditions affreuses^^) 

 

« Ah les courses en grande surfaces c’est moins lourd que les bocaux en verre ? » 

 

« Euh pour les vergetures, je vais acheter cette huile en pharmacie, c’est plus rassurant que l’huile d’olives de la maison » (peut-être que l’huile d’olives marche tout aussi bien mais bon bizarrement je n’ai pas envie de jouer les cobayes !) 

 

 

Ce n’est pas simple de devoir si rapidement adapter sa consommation parce que de nouvelles problématiques apparaissent. Le temps nécessaire pour réfléchir aux alternatives n’est pas forcement suffisant. Et si choisir c’est renoncer, choisir sans réfléchir c’est souvent se tromper. C’est renoncer à d’autres critères qui auraient pu peut-être être remplis avec plus de temps et d’anticipation. 

 

 

L’opposition entre confort, santé et écologie me frappe davantage maintenant qu’auparavant. La vie se construit lentement à l’intérieur mais rien qu’au stade de la grossesse je vois mes choix au quotidien devenir plus difficiles dans la mesure où je ne suis plus seule. Ce petit-être redéfinit les limites de ce que je suis prête à accepter alors qu’il ne fait que quelques centimètres. 

 

 

Déjà, le chemin vers l’essentiel en étant en couple ce n’est pas toujours évident mais à trois comment ce sera ? Saurons-nous nous contenter de l’à peu près pour laisser une place suffisante à l’éthique et à l’écologique ? Trouverons-nous des alternatives compétitives sur le plan de l’usage ? Confort et écologie peuvent-ils vivre durablement ensemble ? 

 

Pour aller vers l'essentiel au début on se regarde le nombril et puis un jour celui-ci s'élève et on va plus loin
Pour aller vers l'essentiel au début on se regarde le nombril et puis un jour celui-ci s'élève et on va plus loin

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Commentaires: 2
  • #1

    Jordi (samedi, 31 août 2019 11:33)

    Des interrogations importantes, éclairantes et rassurantes.
    De mon coté, j'ai aussi ce bras de fer entre responsabilité et qualité de vie. Souhaitant partir outre Atlantique pour mes vacances et disosant d'un capital temps réduit, j'ai opté pour l'avion, mais j'en éprouve un peu de honte (pas assez pour y renoncer, mais assez pour ne pas me faire partir avec la conscience tranquille)... Après, je me rassure en disant que ce n'est pas pour une courte durée, que je ne prends plus l'avion autrement... je me trouve tout un tas de raisons.
    Vient aussi la question de la responsabilité collective et de l'injustice : si tes démaquillant finissent par ne plus être immaculés, mais qu'à coté de toi, d'autres s'en achètent chaque jour des jetables, ça peut être très frustant. Tu as certes été en alignement avec tes convictions, ce qui peut t'apporter beaucoup et qui est important pour être en paix avec toi même. Mais d'un autre coté, tu peux te dire que tu perds en confort et que les autres ont tôt fait de laisser leur empreinte sur le monde. Alors que si on était à la même enseigne, peut-être verrions nous naitre plus de solidarité, et accepterions l'inconfort plus facilement ??
    Je me pose ces questions au moment où je les écris et elles manquent sûrement un peu de maturité, mais ça fait réfléchir et ça apaise. Nous ne sommes pas parfait, loin de là. Mais c'est comme ça !
    Bon courage sur ce chemin compliqué et Félicitations !!

  • #2

    Mam (dimanche, 01 septembre 2019 23:30)

    Heureusement que l’écologie peut vivre avec le confort. Et je dirais même mieux on a besoin du confort pour vivre et pour que la terre vive. L’important est de ne pas confondre confort et sur consommation. Tous les animaux, les plantes, les arbres, cherchent le confort. Un arbre se diriger vers la lumière pour mieux pousser mais dès qu’il l’a trouvée il ne bouge plus.Un oiseau fait un nid et l’améliore pour pouvoir accueillir au mieux ses petits; par contre il n’a besoin que d’un nid.Un écureuil fait des réserves pour mieux passer l’hivers mais ne va pas stoker plus qu’il ne va consommer.Un castor coupe des arbres pour avoir une hutte mais s’arrête pour économiser ses dents. Tous consomment juste ce qu’ils ont besoin et il y a un équilibre entre ce qu’ils prennent et ce qu’ils donnent à la terre.Cette recherche du confort participe au cycle de la vie. Le castor nettoie les rivières, l’oiseau plante des graines, la lionne chasse le plus faible. Les vers de terre labourent. On n’a pas tous la même zone de confort et heureusement car c’est ce qui permet de construire la vie.Demander à un asticot de vivre dans un endroit aseptisé et ben il ne serra pas bien mais vraiment pas bien.
    Mais que fait l’homme pour la terre ? Depuis des millénaires il a évolué, il a créé des outils, des machines, des moyens pour se soigner pour son confort et c’est tant mieux.Car qui veut se passer d’une machine à laver le linge, marcher pied nu, dormir à la belle ou pas étoile, avoir froid, Aller dans des milieux hostiles, pousser son corps à ses limites du supportable, avoir faim? Tout le monde peut « jouer » avec ça un certain temps. C’est même devenu un loisir, un challenge pour avoir plus de sensation et en plus on paye pour le vivre!!!
    L’homme pousse ses limites; il se sent immortel car il a une bonne assurance /assistance. Il se croit supérieur par rapport aux autres êtres. Son erreur n’est pas de vouloir vivre dans le confort mais d’oublier que tous les maillons de la chaîne de la vie sont égaux et qu’il doit faire son travail pour que son maillon reste accroché à la chaîne de la vie.Si non la terre aura vite fait de le remplacer par un autre maillon pour continuer à vivre sans nous
    Mais que doit faire l’homme pour vivre?
    A mon simple avis, il doit rester humble devant tous les maillons, les respecter et les laisser vivre leur vie. Par contre l’homme doit s’occuper de lui et seulement de lui. (C’est ce que font les autres être). Ce n’est pas de l’égoïsme . Mais notre maillon humain doit être solide il ne peut être fort d’un côté et faible de l’autre. Même dans un maillon il faut un équilibre. Un homme qui a faim, que l’on ne soigne pas, que l’on ne respecte pas , ne peut pas s’épanouir (être dans le confort). Il pense à survivre et non à protéger sa part de terre. Il connaît sa terre, a su adapter ses cultures pour manger et ses cultures pour y vivre. Il faut l’aider à vivre au mieux et non pas le détruire pour engraisser un qui a une tête plus grosse que son ventre.
    Mais le système nous pousse à vouloir toujours plus, même si on en a pas besoin. Donc on gaspille. Ce n’est pas pour manger ou pour améliorer notre confort c’est juste pour avoir un court instant le plaisir d’avoir un plus. Et oui même notre éducation ne se satisfait pas que l’on est un = mais nous pousse à avoir un + voir un +++.
    C’est cette part de gaspillage qui se retrouve dans pleins de domaines de notre vie: Être plus performants, faire plus vite, être plus grand, être plus mince, plus jolie, courir plus vite,plus longtemps, plus haut,faire plus que les autres.Sortir de notre zone de confort.
    C’est cette course au plus qui déséquilibre notre vie sur terre et pas notre confort de vivre.

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